banyan-numerik.fr

Je me présente, Patrick GOUJON, photographe nature, plutôt spécialisé en proxi et macrophotographie. En complément de mes prises de vue, je suis également président de la société Banyan Numerik, qui entre autres, édite des livres collectifs dans le domaine de la photographie nature. 

J’ai donc un pied dans chaque partie. La photographie à l’état pur d’un côté et l’édition de livres de l’autre. Une double casquette qui permet d’appréhender l’édition de livre photo dans sa globalité avec respect pour la propriété intellectuelle du photographe.

LE CONTEXTE

Afin d’illustrer parfaitement le sujet de ce billet sur les livres photo nature collectif entre le photographe nature et l’éditeur, quoi de mieux que de prendre ma propre expérience personnelle.

Entrons directement dans le vif du sujet. 

Lundi 3 janvier 2025, je lance à grand renfort de communication sur les réseaux sociaux, mon nouveau site internet dédié en partie à ll’édition de livres photographiques nature collectif.

Dés le mois de janvier 2025, ce sont 4 projets de livres photos nature collectifs qui sont lancés en quasi simultané : 

  • Les plus belles images de macrophotographie de l’année 2024
  • Les plus belles images de paysage de l’année 2024
  • Les plus belles images d’oiseaux de l’année 2024
  • Les plus belles images de mammifères de l’année 2024.

L’ambition est de publier les images de 80 à 100 photographes par livre. Les participations sont entièrement gratuites et ouvertes à tous les photographes nature amateur (sans numéro de SIRET) ou professionnel. Chaque photographe publié sera représenté dans l’ouvrage par une unique image. Une image qui a été sélectionnée par un jury de photographes experts parmi les centaines d’autres participations.

LES CARACTÉRISTIQUES D’UN LIVRE PHOTO COLLECTIF CHEZ BANYAN NUMERIK

La volonté de Banyan Numerik est de rendre l’acquisition d’un livre photo collectif accessible à tous. Idéalement, un livre photo collectif devra se situer à un prix maximal de 32 euros TTC. Idéalement, j’aimerais beaucoup le proposer à 29 euros TTC. Tous ceux qui se sont déjà lancés dans l’aventure éditoriale, savent que c’est ambitieux… et peut-être même irréalisable. 

Plusieurs éléments peuvent réduire le coût de revient… sans réduire la qualité de l’ouvrage. Voici le choix retenu pour chaque livre photo collectif :  

 

  • Adopter une taille standardisée : les livres photo collectif mesureront 21 cm x 29,7 cm (format A4). Une grande taille qui mettra en valeur les photographies.

 

  • Le choix du papier. Un poids de 135g/m2 minimum est requis. 150g/m2 semble être un juste compromis pour offrir assez de matière et sentir chaque page sous ses doigts. important, le papier doit être labellisé FSC. Ce label international garantit que les bois utilisés se conforment aux procédures de gestion durable des forêts.

 

  • La couverture sera rigide et la reliure sera en dos collé cousu. Chaque page sera ainsi fermement tenu sans risque de détachement que l’on peut observer sur les simples reliures collées.

 

  • Une technologie d’impression OFFSET est parfaitement adapté pour un tirage de plusieurs centaines d’exemplaires. Une impression extrêmement onéreuse pour un tirage de quelques dizaines d’exemplaires, qui possède l’avantage de voir son tarif décroître fortement au fur et à mesure que la quantité de tirage augmente. L’intérêt ici est donc de produire un minimum de 300 à 500 exemplaires par tirage.

 

  • Le lieu de fabrication. Je vais être honnête et sincère, pour proposer un livre de qualité avec les caractéristiques mentionnées au-dessus et payer les droits d’auteur aux photographes, il n’est pas possible d’imprimer le livre directement sur le territoire Français comme je l’aurais voulu. Il sera donc imprimé en Europe. Le choix du pays n’est pas encore défini entre la Bulgarie, l’Espagne, l’Italie ou la Slovénie.

 

Détail important, pour que l’image d’un photographe puisse être publiée au sein du projet éditorial, ce dernier doit réussir l’épreuve du feu. C’est-à-dire, atteindre un objectif financier lors d’un financement participatif. Ce projet éditorial collectif n’a de raison d’exister que si un nombre suffisant de personnes est prêt à acheter réellement l’ouvrage. C’est en quelque sorte la base du commerce. 

 

LA MÉTHODOLOGIE

 

Avant de parler financement participatif, il faut d’abord convaincre les photographes nature d’adhérer au projet. 

Pas de photographe = pas de participations = pas de livre, c’est implacable

Pour cela, je sors mon arme fatale : le contrat de cession de droit !

Un contrat sur-mesure rédigé par une avocate reconnue par son expertise en matière de propriété intellectuelle. 

En plus de fixer les obligations et les limites entre le photographe et l’éditeur, ce fameux contrat indique par ailleurs la rémunération forfaitaire ainsi que différents avantages pour le photographe (ex : exemplaire offert ou encore forte remise sur l’achat d’ouvrage).

Bien que le contrat de cession de droit ne soit pas en téléchargement libre sur le site internet de Banyan-Numerik.fr, j’ai pris soin d’indiquer, aussi explicitement que possible, tous les points clés sur une page internet. Ces informations préalables sont, selon mon point de vue, indispensables pour que les photographes puissent s’engager dans l’aventure en toute connaissance et sérénité.

CONSTAT ET CHIFFRES CLÉS SUR LES LIVRES PHOTO EN 2023

Il est reconnu que l’édition photo est un secteur de niche fragile. L’offre de livres photo est très supérieure à la demande. Dans une enquête publiée en septembre 2023, Fabienne Pavia (édition le Bec en l’air) tenait ses propos “ l’éditeur doit réinventer son modèle économique et éditorial à chaque publication”. Pour des raisons évidentes, l’édition d’un livre de photographies est nettement plus couteux à produire qu’un roman littéraire. Les risques financiers sont importants.

 

Toujours selon la même enquête publiée dans le numéro #361 du magazine Réponses Photo, voici les chiffres clés qui s’appuient sur les réponses des 22 éditeurs français de livres photo : 

 

  • Le tirage moyen d’un livre photo est de 850 exemplaires
  • Le prix moyen d’un livre photo est de 40 euros
  • 30% d’invendus par titre en moyenne
  • La rémunération en droit d’auteur est en moyenne de 7% par projet éditorial
  • La remise accordée au photographe pour revente direct du livre est de 30%

 

Je rajouterai que les ventes de livres photo de ces éditeurs reconnus s’appuient en grande partie sur le réseau de distribution des libraires indépendantes et les grandes surfaces culturelles (Cultura, FNAC). 

Même si les librairies peuvent passer commande, la diffusion de livres photo de la société banyan Numerik s’effectue essentiellement sur des Market place (type Amazon), sites internet spécialisés ou directement en festival Photo. La raison est simple, Banyan Numerik ne dispose pas d’une flopée de commerciaux pour démarcher un à un tous les points de vente de livres (environ 17 000 sur le territoire Français).

LA RENTABILITÉ ET LA RAISON D’ÊTRE D’UN PROJET DE LIVRE PHOTO COLLECTIF VU PAR CERTAINS PHOTOGRAPHES.

 

Il n’a pas fallu attendre très longtemps pour voir apparaître certains commentaires de photographes sur ces projets. Personnellement, je les en remercie. Ils me donnent l’occasion d’apporter une vue d’ensemble qui pourrait éclairer plusieurs photographes. 

 Avant de me lancer dans une démonstration chiffré de la réalité, voici 2 commentaires qui ont, en partie, légitimé cet article.

commentaires sur livre photo collectif

Je pense sincèrement que l’opinion, à chaud, retranscrite publiquement par ces 2 photographes est partagé par un grand nombre de mes compatriotes photographes. 

Pour étayer au mieux mes propos, je vais donc me placer en premier lieu du point de vue du photographe, puis je prendrai la place du chef d’entreprise. À vous ensuite de faire votre propre analyse en connaissance de cause. Libre à vous ensuite de partager votre opinion sur les réseaux sociaux.

LIVRE PHOTO NATURE COLLECTIF, DES PHOTOGRAPHES « SOUS-PAYÉ » ?

Qu’apporte réellement le livre collectif nature à son photographe ?, c’est la question à laquelle je tenterai de répondre le plus objectivement possible en abordant successivement l’aspect qualitatif et quantitatif.

 L’aspect qualitatif

Être publié dans un livre de photographie nature est une reconnaissance et un accomplissement pour beaucoup de photographes nature… mais pas tous ! du moins pas de la même manière.

Certains photographes bien établis dans leur métier ou leur passion n’ont que faire de cette distinction, à une exception près : Être publié à côté d’autres talentueux photographes. 

Pour ceux qui ont l’opportunité d’être publié dans un magazine spécialisé comme Nat’images ou Image&nature, on a tous remarqué l’enthousiasme et la reconnaissance de ces photographes qui partagent l’heureuse nouvelle sur les réseaux sociaux.

La photographie nature et animalière est un petit monde dans lequel gravitent quelques dizaines de milliers de photographes nature amateur et professionnel. Une des raisons à cette situation est sans doute le temps à consacrer à cette activité. Les images animalières sont le fruit de connaissances naturalistes, de patience, de sacrifice et un peu d’opportunités. J’ai personnellement une grande admiration pour ces photographes dont la résilience me dépasse. 

 

Garantir à un photographe nature et animalier passionné (peu importe qu’il soit amateur ou professionnel), que son image sera publiée au milieu de ses pairs talentueux à sans doute plus de valeur que la simple idée d’être édité. 

 

C’est pour ces raisons qu’un jury de 3 photographes nature expert est désigné sur chaque projet. Ils sont garants d’une exigence éditoriale envers les photographes participants.

 

L’aspect Quantitatif

Nous y sommes, nous allons parler à présent de ce qui rentre concrètement dans les poches des photographes.

Pour ces 4 premiers projets de l’année 2025, chaque photographe percevra une somme de 20 euros HT par image publiée, par projet et par tirage maximal de 1000 exemplaires. Soit un total de 80 euros HT si le photographe est publié dans chaque projet (la macro, le paysage, les oiseaux et les mammifères de 2024).

À ce montant s’ajoute un exemplaire du livre offert (29 € si on reste fixé sur mon ambition tarifaire). Si le photographe est publié dans les 4 projets, il disposera de 4 livres offerts.

S’il le souhaite, le photographe pourra commander d’autres exemplaires (il n’y a aucune obligation) à un prix très préférentiel. Comme on l’a vu précédemment, la remise du secteur de l’édition est de 30% sur chaque ouvrage. J’envisage de monter cette remise à 50% du prix de vente HT pour une commande supérieur à 10 livres. 

Selon un prix de vente TTC de 29 euros, soit 27,45 euros HT : 

Un photographe qui consentirait à acheter 11 exemplaires devra débourser un montant unitaire de 14,47 euros TTC par livre ((27,45€ – 50%) + la TVA à 5,5%)

Soit un total de 159,17 euros pour les 11 exemplaires.

Pour résumer cet exemple, un photographe pourrait augmenter sa part de rémunération individuelle de 159,87 euros TTC (319 euros de recette – 159,17 euros d’achats d’exemplaires) avec une simple commande de 11 livres.

Beaucoup de photographes qui sont exposants dans des festivals photo ou sur d’autres évènements culturels ne possèdent pas de livres à vendre. En ayant l’opportunité d’être publié dans un livre photo collectif, ils pourraient ainsi disposer d’une source de revenus supplémentaires avec un produit noble.

Je fixe VOLONTAIREMENT une remise maximale à partir d’un seuil de seulement 11 livres, car je ne tiens pas à ce que les photographes intéressé et emporté par l’euphorie du projet se stockent inutilement. J’ai également tenu cette position pour le livre collectif INSPIRATIONS avec 25 photographes. Vous pouvez les contacter pour vérifier mes propos.

CONCLUSION DU POINT DE VUE DU PHOTOGRAPHE

Il est difficile à cette étape de conclure ou pas à une exploitation défavorable des photographes nature sans tenir compte des coûts réels de l’éditeur.

 Si je reprends ma casquette de photographe nature passionné, il est clair que je ne vais pas m’enrichir avec ces droits d’auteur. Mon intérêt premier à participer à ce type de projet ne se portera certainement pas au niveau des droits d’auteurs indiqué dans le contrat de cession. Cependant, je serais rassuré de l’existence d’un tel contrat pour fixer les obligations et les limites d’exploitation de l’éditeur.

Une chose est sûre, je serais gratifié de me retrouver au milieu de photographes dont j’admire le talent. L’exemplaire offert compense en partie la faiblesse des droits d’auteur. 

Depuis que j’ai gouté aux expositions en festival photo, je ne pourrai plus m’en passer. Proposer sur mon stand d’exposition un livre dont je suis fier de faire partie et pour lequel je n’ai pris aucun risque financier est une opportunité financière que je prends volontiers. 

La remise de 50% sur chaque livre photo peut également m’inciter à offrir, à moindre coût, ces livres photo à mon entourage.

LIVRE PHOTO NATURE COLLECTIF, « UN ELDORADO FINANCIER » POUR L’EDITEUR ? 

Je ne pense pas que beaucoup de professionnels se livrent à de tels exercices de démonstration. Personnellement, cela me plaît de faire preuve d’autant transparence. 

 Je reprends à présent ma casquette d’entrepreneur. C’est-à-dire ma fonction de chef d’entreprise qui est censé me faire vivre. Voici de manière implacable, la liste des principaux coûts de revient pour chaque projet de livre photo nature collectif : 

 Coût de revient unitaire de l’impression d’un livre photo collectif pour un tirage de 500 exemplaires : environ 8 à 12 euros HT. En prenant une moyenne de 10 euros par livre, soit 5000 euros

 Cout des droits d’auteur : 20€ HT par photographe, soit 2000 euros HT sur la base de 100 photographes

 Coût d’un exemplaire offert par photographe : 10 € HT, soit 1000 € au total pour les 100 photographes

Coût marketing / communication / Presse : 600 euros HT par projet (environ 30 exemplaires offerts)

Coût logiciel et autres abonnements : 100 HT euros par projet

Coût logistique prévisionnel par projet (consommable, expédition, stockage) : 1500 HT euros

 

Total : 9200 euros HT (les exemplaires offerts aux photographes n’ont pas été pris en compte dans ce calcul, car déjà payé à l’impression)

 

Recette prévisionnelle en partant sur la base de 370 livres (500 livres imprimés – 100 livres offerts aux photographes – 30 livres offerts pour la promotion)

370 x 27,45 euros HT (29 € TTC) = 10 156 euros  HT

 

Gain pour l’éditeur pour 500 exemplaires tirés : 956 euros

 

Ces 370 livres ont été vendus sans aucune remise. Toutes remises supplémentaires viendront fortement dégrader la rentabilité du projet.

 

2 axes principaux sont possibles pour améliorer la rentabilité du projet : 

  • Augmenter les ventes
  • Augmenter le prix de vente à 32 ou 35 euros

 

Vous choisiriez quel axe si vous étiez aux commandes de Banyan Numerik ?

 

Point important :  ces 4 premiers livres de l’année ont un marqueur temps (communication autour des images de 2024). Cela signifie que ce livre risque d’être considéré comme obsolète aux yeux de nombreux acheteurs très rapidement. La question à se poser : est-il judicieux de faire apparaître l’année directement sur la couverture ? Après réflexion, je ne pense pas. Le sous-titre Tome 1 est sous doute plus approprié si on veut prolonger le cycle de vente.

 

Ah, j’oubliais, Il y a une chose qui n’a pas été prise en compte dans l’équation, c’est le temps passé.

 

D’après vous, combien de temps, je passe sur chaque projet si on considère l’ensemble de ces tâches : planification, les dizaines de publications sur les réseaux sociaux, la réalisation des devis, la réponse aux centaines de mails, la mise en place de toute l’infrastructure web pour les participants, la sélection des photographes, le maquettage, la signature de tous les contrats, les déclarations à l’URSSAF, les ordres de virements, la réception des livres, la réalisation de la campagne de financement participatif, les dizaines ou centaines d’envois postaux, etc…)

 

Vous imaginez bien que pendant que je fais tout ça, je ne réalise aucune autre activité rémunératrice.

 Combien d’entre vous, ferait le pari que je suis en train de faire ? 

J’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour les entrepreneurs et la possibilité de créer de la valeur avec son propre travail. Je ne dénigre pas le salariat. Jusqu’à mes 45 ans, j’ai été salarié de grandes entreprises. J’ai créé une société pour 3 raisons principales : 

 

  • Passer plus de temps avec ma famille
  • Construire une entreprise à mon service et selon mes propres convictions
  • Et bien sûr, être libre financièrement.

 Le seul hic, c’est que cela ne se fait pas sans risque !

CONCLUSION

J’ai pris un grand plaisir à vous informer sur les décisions stratégiques et les éléments concrets qui constituent ce type de projet éditorial au sein de ma société.

 

L’ADN même de ces projets éditoriaux est le collectif. C’est en quelque sorte un gagnant-gagnant. 

 

Après avoir passé quelques heures à la réflexion et à la rédaction de cet article, je ressens aucunement le sentiment d’exploiter les photographes nature.

Après la lecture de ce loooooong article, je suis curieux de connaître votre opinion à présent 🙂 .

 

IMPORTANT : L’écriture de cet article est entièrement basée sur la direction que je souhaite donner aux projets de livres photo collectifs à travers ma société commerciale. Il est probable que cette ligne éditoriale ne soit pas tenue auprès d’autres éditeurs. C’est la raison pour laquelle je vous conseille d’être toujours vigilant. Je vous recommande également de vous informer le plus possible sur la structure juridique de la société, les dirigeants, les contrats et même auprès d’autres photographes. 

 

Ma propre aventure dans le milieu de l’édition ne fait que commencer. J’ai bon espoir qu’elle se poursuive… avec votre soutien.

Le format de ces aventures éditoriales collectives sera amené à se transformer selon les thématiques envisagées. Les prochains projets de livre collectif pourront regrouper seulement 25 ou 50 photographes. Les contreparties financières s’ajusteront en conséquence.

J’ai déjà quelques idées : 

 

  • 25 photographes français à découvrir
  • La macrophotographie au féminin
  • Les animaux dans la neige
  • La photographie animalière en noir et blanc

 

Vous avez des suggestions ?

 

Je suis impatient de lire vos retours sur cet article